fevrier1998
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LA LETTRE

DE

S.O.S. PSYCHOLOGUE

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NUMÉRO : 41 REVUE MENSUELLE FÉVRIER 1998

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Au sommaire de ce numéro :

Auteur Titre de l'article
E. Graciela Pioton-Cimetti L'autre, l'écrivain avec « son autre », la création
E. Graciela Pioton-Cimetti El Otro, el artista y su obra
Hervé Bernard Qui est l'autre pour moi ?
Hervé Bernard ¿Quien es el otro para mi?
Florence Boisse L'autre, si proche
Elisabeth Courbarien C'est pas moi, c'est lui !
Elisabeth Courbarien ¡No soy yo, es él!
B. Siebzehner - C. Waisman - E. G. Pioton-Cimetti El Otro
E. Graciela Pioton-Cimetti La misère de la vieillesse


L'autre, l'écrivain avec « son autre »,
la création


       Toute œuvre d'art, pour peu qu'elle soit géniale, apporte avec elle un mystère, apparaît comme un miracle que l'analyse ne peut réduire. De là, la difficulté de donner du chef-d'œuvre littéraire une définition parfaite et unique. Je suis, dès lors, tentée de compter autant de formules d'œuvres d'art qu'il existe de véritables tempéraments d'écrivains.

       Pourtant, si j'essaie de me placer hors du temps pour juger les chefs-d'œuvre littéraires d'un peu plus haut, il est possible de dégager une définition unique des différents types d'œuvres d'art, définition qui coïncide avec l'analyse de l'émotion qu'exerce toute œuvre véritable : la vue d'un chef-d'œuvre inspire le sentiment de la perfection qui s'impose et, au-delà du sentiment confus, il est possible de pressentir une harmonie intense, un équilibre merveilleux entre certains rapports qui sont le plus souvent la forme et le fond. L'intuition révèle que toute œuvre véritable est soumise à un principe d'harmonie et de perfection.

       L'écrivain, dont vous allez découvrir l'identité, dit :

« Là tout n'est qu'ordre et beauté,
Luxe, calme et volupté »*

…et nous ajouterons l'autre n'est qu'ordre et beauté, luxe, calme et volupté.

       Ces mots simplement juxtaposés sont, en réalité, liés intimement entre eux par une logique interne et, comme le ferait un éventail qui s'ouvre, ils déplient d'abord les mystères les plus intimes de l'œuvre d'art pour expliquer ensuite le charme ensorceleur qu'elle peut exercer.

***

       Tout chef-d'œuvre digne de ce nom – pour reprendre une image de Platon, ce poète philosophe qui alla toujours au-delà des apparences – doit présenter l'unité d'un organisme : il doit réaliser cet équilibre harmonieux propre au corps humain, où chaque partie dépend de l'ensemble et obéit à une loi de finalité. Dans le domaine littéraire, la finalité sera l'idée directrice qui organisera le poème et elle se confondra avec l'ordre même de la vie intérieure de l'artiste.

       Tant il est vrai que la laideur naît d'une désharmonie et que la beauté est la traduction visible d'un ordre intérieur. Cette beauté résulte d'un équilibre extrêmement fragile, car elle exige de l'écrivain une pensée disciplinée, sans cesse consciente de toutes ses démarches ou tout au moins obéissant à une logique affective et un style assez souple pour traduire les infinies nuances de l'idée.

       Aussi la traduction sensible de l'ordre et de la beauté exigés par la véritable œuvre d'art sera-t-elle le luxe, le calme et la volupté.

       La poésie est le luxe qui baigne l'œuvre d'art et demeure une preuve tangible de sa beauté. « Poésie » doit être pris dans un sens très large : ce mot désigne l'aptitude naturelle de l'artiste à traduire sa pensée par des images ou par une musique. En effet, il existe autant de poésie dans une oraison funèbre de Bossuet que dans une ode de Lamartine : si elles diffèrent, c'est qu'elles traduisent deux tempéraments d'écrivains fortement dissemblables, car ce luxe qu'est la poésie est le reflet de la vie intérieure de l'écrivain.

       Le calme présente le fâcheux inconvénient d'évoquer une impassibilité et fait songer plutôt à l'immobilité de certaines poésies parnassiennes de Leconte de Lisle. Le calme d'une œuvre d'art, éloigné de toute impassibilité parnassienne comme de la sensibilité outrée telle qu'elle peut se découvrir chez certains Romantiques ou même chez un Diderot, demeure un des signes sensibles de l'ordre et de la beauté nécessaires à toute œuvre d'art parfaite.

       Ce mot de calme est corrigé par le terme de volupté et c'est sur cette dernière parole que se terminent les vers. Or l'analyse de la volupté qui désigne à la fois la jouissance douloureuse de l'écrivain composant son œuvre et le plaisir délicat du lecteur révèle un sentiment profond, contenu, qui s'alimente à sa propre substance ; point de brutalité, ni de violence dans la volupté qu'inspire la contemplation d'une œuvre d'art, mais une joie délicate, raffinée et douce. La volupté nous transporte dans un monde irréel, celui du demi-songe ou celui de la conscience de l'écrivain. Elle enchante et demeure le plaisir couronnant la véritable œuvre d'art qui a satisfait à l'ordre et à la beauté nécessaires et les a traduits par le luxe de la poésie et le calme de la pensée.

***

       En définitive, le pur chef-d'œuvre littéraire doit envelopper une logique interne qui n'exclut pas le dynamisme de la vie et une sorte d'unité affective. Sa beauté se manifestera par le luxe poétique éloigné de toute froide sécheresse comme de toute violente passion, par un calme frémissant de vibrations contenues, révélant la puissance créatrice, la chaleur de vie de l'artiste.

       Tout lecteur qui peut dire avec Proust : « La jouissance que procure une œuvre d'art révèle non de la délectation, mais de l'enchantement », est sûr de découvrir l'œuvre d'art dans toute sa pureté, son harmonie et sa perfection divines.

***

Dimanche 8 février 1998

       Je ne veux pas aborder le thème d'une manière psychologique.

       Je ne parlerai pas du grand autre, mais de l'autre humain qui a partagé ma vie, mes vies, l'autre aimé : soit l'homme ou les hommes, selon les cas, les enfants, les parents, les grands-parents. Enfin, tous ceux qui, un jour, ont constitué mon éternité ici-bas. J'ai pu les aimer un instant seulement. L'instant vécu fait éternité !

       C'est bien paradoxal, j'ai la nostalgie de l'autre, même s'il est présent, car sa présence me fait vouloir la solitude où un autre plus puissant, paisible et calme puisse apparaître.

       Je reconnais que je n'aime pas la solitude, mais, en même temps, je désire profondément un « autre idéal » capable de ne pas vouloir être mon maître ou mon esclave. Je sais que j'exprime la réalité de tous : l'autre idéal, mais aussi l'espace pour accepter « l'idéal de l'autre ».

       Nous parlons, chez nous, théoriquement, intellectuellement, mais dans le monde « entre les autres et avec les autres », comme disait Sartre. Et ne me demandez pas la page où il le dit, car je ne parle pas aujourd'hui en intellectuelle qui cherche, d'après un tas de livres, les citations, mais comme un être vivant possédant une expérience de vie, de culture et de réalité non négligeable. Je ne sais pas où il a pu dire cela, mais je me souviens d'être restée avec l'air perdu de quelqu'un qui est en face d'un instant de conscience quand je l'ai lu. Il avait raison et je suis avant tout dans le monde et avec les autres. Je dirai même que je suis pour les autres.

       Je sais bien que je ne suis pas triste et que je ne voudrais pas revenir un seul instant en arrière dans ma vie. Sans être mélancolique, je deviens nostalgique en face de la réalité des instants non vécus avec l'autre aimé.

       La vie passe trop vite. Nous devrions à trente ans avoir réussi à tout faire sans avoir laissé des moments glorieux en raison de l'incompatibilité émotionnelle avec l'autre. Je ne veux pas rester plus longtemps aujourd'hui à réfléchir sur ce thème. C'est une nuit d'hiver, simplement avec une lune ronde sur un balcon d'un septième étage donnant sur un jardin superbe. Sortir sur ce balcon m'a toujours inspirée. Bientôt, nous quitterons cet appartement. Il fait trop froid. Il est trop grand pour héberger ce que nous sommes aujourd'hui extérieurement. L'autre, pourrai-je l'aimer ? Pourra-t-il être un lieu de création, de paix et de réflexion ? L'autre, c'était aussi le lieu bien aimé où j'habitai. Comme j'ai pu l'aimer, le soigner, le rêver ! Maintenant, je trouve cet endroit que j'aimais trop grand pour moi. Parfois, je rêve d'une studette près des étoiles toute blanche où je n'aurais pour visiteurs que ceux que je choisirais. Je possède un appartement sur la mer qui me donne l'impression de ne jamais se finir. J'ai besoin des murs près de moi. J'ai besoin de l'autre plus proche que jamais. Un nid idyllique où la confrontation soit plus facile, plus sensuelle.

       Mon moi intime s'est réduit. J'ai besoin des étoiles et de toi, l'autre bien aimé dans un cadre cosy. Enfin que ce soir, je te laisse mon autre. Demain, il fera jour. L'odeur du café, le soleil – s'il ne pleut pas – me parlera des jours nouveaux où je deviendrai moi-même en dehors des apparences et où tu seras toujours l'autre, mais plus proche. C'est tard, j'ai besoin de toi.

***

       Je le sais, il est comme un torrent. Les mots s'enchaînent. Les images sont si fortes que je tremble. Le torrent contient des pierres énormes, mais aussi des petits cailloux brillants où je trouve la couleur des yeux de l'autre.

***

Il y a un autre ici qui dépasse mon savoir.

Il est venu s'asseoir si près de moi

que je ne sais plus qui je suis.

Il me parle des feuilles mortes

des automnes dorés

des printemps prématurés

et il ne sait même pas écrire,

mais je le fais pour lui.



* L'autre, vous l'avez deviné : c'est Baudelaire.


Fait à Paris, le 8 février 1998
près de l'Autre
et il y a des étoiles.

E. GRACIELA PIOTON-CIMETTI


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El Otro, el artista y su obra


       Toda obra de arte, por poco que sea genial, aporta con ella un misterio, aparece como un milagro que el análisis no puede reducir. De ahí la dificultad de dar de la obra maestra literaria una definición perfecta y única. A partir de esto, me siento incitada a contar tantos tipos de obras de arte como de verdaderos temperamentos de escritor.

       Sin embargo, si intento situarme más allá del tiempo para juzgar las obras maestras literarias de un poco más alto, es posible extraer una definición única de los distintos tipos de obras de arte, definición que coincide con el análisis de la emoción que ejerce toda obra verdadera: la vista de una obra maestra inspira el sentimiento de la perfección que se impone y, más allá del sentimiento confuso, es posible presentir una armonía intensa, un equilibrio maravilloso entre ciertas relaciones que son a menudo la forma y el fondo. La intuición revela que toda obra verdadera está sometida a un principio de armonía y de perfección.

«Aquí todo es orden y belleza,
Lujo, calma y voluptuosidad»*

       Estas palabras simplemente yuxtapuestas están, en realidad, íntimamente ligadas entre sí por una lógica interna y, al igual que un abanico cuando se abre, desplegan primero los misterios más íntimos de la obra de arte para explicar después el embrujo encantador que puede ejercer.

***

       Toda obra maestra digna de este nombre –para utilizar una imagen de Platón, ese poeta filósofo que fué siempre más allá de las apariencias– debe presentar la unidad de un organismo: debe obtener ese equilibrio armonioso propio al cuerpo humano, en que cada elemento depende del conjunto y obedece a una ley de finalidad. En el tema literario, la finalidad será la idea directriz que organizará el poema y se confundirá con el orden mismo de la vida interior del artista, ese Otro de la creación que nos subyuga…

       Es tanto verdad que la fealdad nace de una desarmonía y que la belleza es la traducción visible de un orden interior. Esta belleza resulta de un equilibrio extremamente frágil, pues exige del escritor un razonamiento disciplinado, consciente sin cesar de todos sus pasos o al menos obedeciendo a una lógica afectiva y un estilo bastante flexible para traducir los infinitos matices de la idea.

       De esta manera la traducción sensible del orden y de la belleza exigidos por la verdadera obra de arte serán el lujo, la calma y la voluptuosidad.

       La poesía es el lujo que baña la obra de arte y sigue siendo una prueba tangible de su belleza. «Poesía» debe tomarse en un sentido muy amplio: esta palabra designa la capacidad natural del artista a traducir su pensamiento por medio de imágenes o música. En efecto, hay tanta poesía en una oración fúnebre de Bossuet como en una oda de Lamartine: si son distintas, es porque traducen dos temperamentos de escritores muy diferentes, pues este lujo que es la poesía es el reflejo de la vida interior del escritor, el Otro de la creación que nos subyuga…

       La calma tiene el desagradable inconveniente de evocar una impasibilidad y hace pensar más bien en la inmovilidad de ciertos poemas parnasianos de Leconte de Lisle. La calma de una obra de arte, alejada de toda impasibilidad parnasiana como de la sensibilidad ultrajada que se puede descubrir en ciertos Románticos o incluso en un Diderot, sigue siendo uno de los signos sensibles del orden y de la belleza necesarios a toda obra de arte perfecta.

       La palabra calma se encuentra enriquecida por el término de voluptuosidad y es con esta última palabra con la que se terminan los versos. El análisis de la voluptuosidad que designa a la vez el goce doloroso del escritor componiendo su obra y el placer delicado del lector revela un sentimiento profundo, contenido, que se alimenta en su propia substancia; ninguna brutalidad, ni violencia en la voluptuosidad que inspira la contemplación de una obra de arte, sino una alegría delicada, refinada y dulce. La voluptuosidad nos transporta a un mundo irreal, el del semi-sueño o el de la conciencia del escritor. Ella encandila y permanece como el placer coronando la verdadera obra de arte que se ha plegado al orden y a la belleza necesarias y las ha traducido por el lujo de la poesía y la calma del pensamiento.

       En definitiva, la pura obra maestra literaria debe contener una lógica interna que no excluye el dinamismo de la vida y una especie de unidad afectiva. Su belleza se manifestará por el lujo poético alejado de toda fría sequía como de toda violenta pasión, por una calma agitada por vibraciones contenidas, revelando la potencia creadora, el calor de vida del artista.

       Todo lector que puede decir con Proust: «El goce que procura una obra de arte se parece más al encandilamiento que a la delectación», está seguro de descubrir la obra de arte en toda su pureza, su armonía y su perfección divinas.

***

Domingo 8 de febrero de 1998

       No quiero abordar el tema de una manera psicológica.

       No hablaré del gran Otro, sino del Otro humano que ha compartido mi vida, mis vidas, el Otro amado: ya sea el hombre o los hombres, según los casos, los hijos, los padres, los abuelos. En fin, todos los que, un día, han constituido mi eternidad aquí abajo. He podido amarlos sólo un instante pero ese instante vivido ¡parece una eternidad!

       Es una paradoja, siento la nostalgia del Otro, incluso si está presente, pues su presencia me hace desear la soledad en que otro más potente, apaciguado y tranquilo pueda aparecer.

       Reconozco que me gusta la soledad, pero, al mismo tiempo, deseo profundamente al «otro ideal» capaz de no querer ser ni mi amo, ni mi esclavo. Ya sé que expreso la realidad de todos: el otro ideal, más también el espacio para aceptar «el ideal del Otro».

       Hablamos, entre nosotros, teóricamente, intelectualmente, pero en el mundo, «entre los otros y con los otros», como decía Sartre. Y no me pregunten en qué página lo dice, pues no hablo como una intelectual que busca en un montón de libros citaciones, sino como un ser vivo que posee una experiencia de vida, de cultura y de realidad no desdeñable. No sé dónde pudo decir ésto, pero recuerdo haberme quedado con el aire perdido de alguien que estaba ante un instante de conciencia cuando lo leí. Tenía razón y estoy ante todo en el mundo y con los otros. Diría incluso que estoy para los otros.

       Sé que no estoy triste y que no querría volver atrás en mi vida aunque sólo fuera un instante. Sin estar melancólica, me vuelvo nostálgica ante la realidad de los instantes no vívidos con el Otro amado.

       La vida pasa demasiado de prisa. A los treinta años deberíamos haber conseguido hacerlo todo sin haber dejado de vivir momentos gloriosos a causa de la incompatibilidad emocional con el Otro. No quiero, hoy, eternizarme sobre este tema. Es una noche de invierno, simplemente con una luna redonda sobre un balcón de un séptimo piso que da sobre un jardín magnífico. Salir a este balcón siempre me ha inspirado. Pronto, dejaremos este piso. Hace demasiado frío. Es demasiado grande para albergar lo que somos hoy exteriormente. El Otro, ¿podré quererlo?, ¿podrá ser un lugar de creación, de paz, de reflexión? El Otro, es también el lugar bien amado donde vivo. ¡Cuánto he podido quererlo, cuidarlo, soñarlo! Ahora encuentro este lugar que amaba demasiado grande para mí. A veces, sueño con tener un departamentito cerca de las estrellas, completamente blanco en el que los únicos visitantes serían los que yo escogiera. Poseo un piso de cara al mar que me da la impresión de no acabarse nunca. Necesito a las paredes cerca de mí. Necesito al Otro más cerca que nunca. Un nido idílico en que la confrontación sea más fácil, más sensual.

       Mi yo íntimo se ha reducido. Necesito a las estrellas y a vos, el Otro bien amado en un entorno cosy. En fin, esta noche, ¡te dejo mi Otro! Mañana será otro día. El olor del café, el sol –si no llueve– me hablarán de nuevos días en que seré yo misma más allá de las apariencias y en que tú seguirás siendo el Otro, pero más cercano. Es tarde y te necesito.

***

       Lo sé, es como un torrente. Las palabras se encadenan. Las imágenes son tan fuertes que tiemblo. El torrente contiene piedras enormes, y también pequeños cantos brillantes en los que encuentro el color de los ojos del Otro.

***

Hay Otro aquí que sobrepasa mi saber.

Ha venido a sentarse tan cerca de mí

que ya no sé quien soy.

Me habla de hojas muertas

de otoños dorados,

de primaveras prematuras

y ni siquiera sabe escribir,

pero lo hago por él.



* El Otro, lo han adivinado: es Baudelaire.


Hecho en Paris, el 8 de febrero de 1998
cerca del Otro y el cielo está estrellado.

E. GRACIELA PIOTON-CIMETTI


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Qui est l'autre pour moi ?


       Quel thème curieux que de traiter de l'autre ! Il me semble que, dans notre société de plus en plus individualiste et égoïste, le sujet à la mode est de parler de soi. Mais les deux thèmes sont-ils vraiment différents, sont-ils aussi distants l'un de l'autre ? Au-delà de la simple observation objective et physique - distinction entre l'autre et moi -, une analyse plus fine nous montre que le moi et l'autre peuvent avoir des points communs. Par exemple, quand ils appartiennent à une même famille, à un même groupe, à une même culture.

       La psychologie nous enseigne que l'identité d'un individu se construit à travers une série d'identifications à l'autre. Nous empruntons un trait de caractère à un de nos parents, ou alors nous adoptons le trait opposé par réaction ou par rébellion. Nous imitons la conduite, le style d'une personne célèbre, car nous apprécions son action ou les valeurs qu'elle défend. C'est sur ces différentes caractéristiques empruntées ça et là, au gré de notre histoire, de nos penchants, que le processus d'individuation va nous conduire à réaliser nos désirs propres, à constituer notre autonomie par rapport aux autres. À force de volonté et de conscience, nous apprenons à ne pas être de pâles copies d'autres personnes, mais à assumer notre propre réalité intérieure et extérieure, notre propre désir, pour le meilleur et pour le pire.

       Ce rapide tour d'horizon de construction de notre personnalité, tout simplement de notre apprentissage de la vie, nous montre qu'on ne peut pas aborder son soi sans approcher l'autre. À tout instant de notre vie, dans toute situation, nous pensons et agissons avec l'autre ou plusieurs autres en nous, avec les différents éléments des autres que nous avons intériorisés. L'autre est celui qui nous donne la vie, celui qui fait aller vers la vie et celui grâce à qui nous pouvons satisfaire nos besoins les plus basiques, comme, par exemple, acheter des aliments pour se nourrir, dormir sous le toit d'une habitation, nous déplacer à distance dans un véhicule.

       Alors, quoi de plus naturel, quoi de plus nécessaire que d'approcher l'autre, de comprendre l'autre, de respecter l'autre, d'aimer l'autre, puisqu'il est une part fondamentale de nous-mêmes ?

       L'autre est aussi le symbole de la dualité qui scande presque chaque seconde de notre vie. La psychologie freudienne a même adopté cette dualité comme principe fondateur : la psychanalyse se veut une psychologie du conflit.

       Par le jeu des projections, des déplacements et des condensations, l'autre peut devenir un acteur du théâtre du moi où vont se jouer toutes ces modalités conflictuelles qui viennent d'être évoquées.

       Le surmoi pourra prendre l'apparence d'un homme autoritaire. Peut-être le père trop dur que nous avons eu dans notre enfance, auquel nous sommes toujours, malgré nous, soumis, sans trop le savoir. Nous savons que nous avons un père autoritaire, mais nous ne faisons pas le rapprochement avec notre conduite au quotidien.

       Chez un homme, le ça pourra prendre le visage d'une belle jeune femme qui cherche à nous caresser dans le sens du désir et de la nouveauté, mais une retenue, une pudeur, malheureusement maladive nous incitent à réagir de façon répétitive par la prudence, comme s'il y avait nécessairement danger.

       La vie est donc un incessant échange avec l'autre, en soi ou extérieur à soi, ou encore avec les autres que nous fantasmons intérieurement. Mais n'oublions pas le principe de réalité, qui nous invite à satisfaire nos pulsions et nos désirs avec l'autre, celui qui est extérieur au soi ! Si nous pouvons nous mentir à nous-mêmes, on ne peut indéfiniment se tromper avec l'autre, car celui-ci nous renvoie sa propre réaction à notre conduite, répond à notre attitude. Souvenons-nous de Jung qui disait que « l'homme a besoin de l'autre pour se connaître » !



* Ce mécanisme, que la psychanalyse appelle le refoulement, intervient à l'insu de la personne.


HERVÉ BERNARD


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¿Quien es el otro para mi?


       ¡Que tema tan extraño hablar del Otro! Me parece que, en nuestra sociedad cada vez más individualista y egoísta, el tema de moda es hablar de sí mismo. Pero, ¿son los dos temas tan realmente distintos el uno del Otro? Más allá de la simple observación objetiva y física –distinción entre el Otro y yo–, un análisis más detallado nos muestra que el yo y el Otro pueden tener puntos comunes, por ejemplo cuando pertenecen a la misma familia, al mismo grupo, a la misma cultura.

       La psicología nos enseña que la identidad de un individuo se construye a través de una serie de identificaciones al Otro. Tomamos un trazo de carácter a uno de nuestros padres, o aún adoptamos el trazo opuesto por reacción o por rebelión. Imitamos la conducta, el estilo de una persona famosa, pues apreciamos su acción o los valores que defiende. Es así como, sobre estas diferentes características tomadas aquí y allá, según nuestra historia, nuestras inclinaciones, el proceso de individualización va a conducirnos a realizar nuestros propios deseos, a constituir nuestra autonomía con respecto a los demás. A fuerza de voluntad y de conciencia, aprendemos a no ser pálidas copias de otras personas, sino a asumir nuestra propia realidad interior y exterior, nuestro propio deseo, para lo mejor y para lo peor.

       Este rápido repaso de la construcción de nuestra personalidad, simplemente de nuestro aprendizaje de la vida, nos muestra que no se puede abordar su yo sin acercarse al Otro. En cada instante de nuestra vida, en cada situación, pensamos y actuamos con el Otro o con varios Otros en nosotros, con los diferentes elementos de los otros que hemos interiorizado. El Otro es el que nos da la vida, el que nos hace ir hacia la vida y gracias al cual podemos satisfacer nuestras necesidades más básicas como por ejemplo comprar comida para alimentarse, dormir bajo el techo de una casa, desplazarnos a distancia en un vehículo.

       Entonces, ¿qué será más natural, qué será más necesario que el acercarse al Otro, comprender al Otro, respetar al Otro, amar al Otro, pues es una parte fundamental de nosotros mismos?

       El Otro es también el símbolo de la dualidad que pauta casi cada segundo de nuestra vida. La psicología freudiana ha adoptado incluso esta dualidad como principio fundador: el psicoanálisis quiere ser una psicología del conflicto.

       Por el juego de las proyecciones, de los desplazamientos y de las condensaciones, el Otro puede convertirse en actor del teatro del yo donde van a representarse todas estas modalidades conflictuales que acabamos de evocar.

       El Superyo podrá tomar la apariencia de un hombre autoritario, quizás el padre demasiado severo que tuvimos en nuestra infancia, al que seguimos estando a pesar nuestro sometidos, sin darnos demasiado cuenta. Sabemos que tenemos un padre autoritario, pero no vemos la relación con nuestra conducta cotidiana.

       En un hombre el Ello podrá tomar el aspecto de una guapa mujer que intenta acariciarnos en el sentido del deseo y de la novedad, pero un recato, un pudor, desgraciadamente enfermizo nos incitan a reaccionar de manera repetitiva por la prudencia, como si hubiera necesariamente peligro.

       La vida es pues un incesante intercambio con el Otro, en sí o al exterior de sí, o incluso con los otros que fantasmamos interiormente. ¡Pero no olvidemos el principio de realidad, que nos invita a satisfacer nuestras pulsiones y nuestros deseos con el Otro, el que es exterior al yo! Si podemos mentirnos a nosotros mismos, no se puede engañar indefinidamente al Otro, pues éste nos devuelve su propia reacción a nuestra conducta, responde a nuestra actitud. ¡Recordemos a Jung que decía «el hombre necesita al Otro para conocerse»!


HERVÉ BERNARD


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L'autre, si proche


       En psychologie, l'aptitude à faire la différence entre soi et l'autre marque, en dehors de la période de croissance infantile, la normalité. En psychiatrie notamment, on connaît les conséquences néfastes pour un malade et/ou pour ses proches de l'absence de limite entre soi et l'autre : dépression grave, délire paranoïaque, schizophrénies…

       Du temps de Freud et de Charcot, « les belles hystériques » étaient reconnaissables à leurs symptômes d'identification à l'autre ; symptômes qu'on levait soit par l'hypnose, soit, plus tard, par la parole.

       Sortis de ces cas, nous avons l'impression que nous sommes sauvés. Sauvés du risque de se prendre pour un autre, de vivre une vie qui ne soit pas la nôtre, d'aimer un être que nous n'avons pas choisi, de s'égarer sur nos choix de vie, de se mentir à soi-même.

       Or nous avons tous fait l'expérience de réactions que nous n'avions pas voulu avoir, de difficultés à être soi-même, d'incapacité à faire le deuil de l'autre.

       Il est des circonstances où cette fameuse limite entre soi et l'autre est difficile à maintenir : au moment de la maternité, par exemple.

       Les psychanalystes insistent sur le dur apprentissage de l'enfant qui doit s'autonomiser ; ils évoquent moins souvent celui de la mère qui a vécu neuf mois avec un être et qui est amenée, elle aussi, à s'en détacher.

       On observe, dans les maternités, les réactions instinctives, donc irréfléchies, des parturientes qui, sitôt dans leur chambre, récupèrent leur enfant pour dormir avec eux. C'est une évidence et même un impératif, une tension physique et psychologique.

       L'équipe hospitalière accourt alors, les bras au ciel, en fustigeant verbalement la jeune maman comme une écolière, arrachant l'enfant de ses bras, de son ventre et assénant vertement que « c'est dangereux pour l'enfant qui pourrait tomber, s'étouffer, etc. ». Pétrifiée par ce monde où l'on prétend qu'elle devient un danger potentiel pour son enfant, elle reste sans voix !

       Le système hospitalier est ainsi fait que la mère a vite fait de comprendre que son enfant n'est plus vraiment le sien et qu'il est déjà celui d'une société codifiée.

       L'adulte de mère se souvient, en effet, de cette réalité et tait ses émotions et ses instincts : « Comprenez, Madame, vous êtes en territoire social ! »

       Alors, on se détache physiquement de son enfant, mais on s'arrange pour lutter contre la fatigue et les malaises afin de le garder un peu plus longtemps. On prétexte, un soir, une tache qui nous oblige à le changer de manière à donner une raison sociale à des actes qui s'enracinent évidemment dans l'émotionnel.

       On oublie qu'hier, encore, notre schéma corporel était « deux » ; qu'aujourd'hui, il est devenu « un » ; mais notre psychologie n'a pas suivi le même processus d'expulsion rapide que celui du détachement physique !

       La réparation corporelle post-partum (cicatrisations, re-cyclisation, re-contraction des muscles, allégement des cartilages…) permet, malgré son caractère ennuyeux, la réparation psychologique : il nous reste des effets secondaires. Il a donc bien existé un événement corporel qu'on ne peut oublier, preuve qui nous soulage.

       Le rétablissement physique lors des fameux trois mois est, de façon curieuse, étroitement lié à l'autonomie naissante du nourrisson, c'est-à-dire, finalement, au retour de celle de la mère.

       Cette dernière ne doit plus vivre remplie par un autre, mais vidée par cet autre. Il lui faut de nouveau trouver en elle sa propre consistance.

       Pendant que son enfant s'identifie à une partie d'elle-même pour se construire sa propre personnalité, la mère, elle aussi, se surprend à avoir mal lorsque son enfant souffre, à avoir faim lorsqu'il crie famine, à retrouver ses instincts ludiques quand il veut jouer…

       Lorsqu'on se penche sur une famille au sens large, on peut percevoir ces mêmes états d'identification : on souffre pour ses proches, on les ressent sans avoir besoin de se parler.

       On peut fuir. L'Autre est toujours en nous, au-delà du temps, au-delà des mots.

***

L'autre, avec un petit « a », c'est
celui qui m'atteint superficiellement
celui qui s'égare sur mes besoins
celui qui enfreint ma maturité
celui qui m'ignore
celui qui me hait
l'enfer

L'Autre, avec un grand « a », c'est
celui qui me touche profondément
celui qui pressent ce qui est bon pour moi
celui qui entend la voix de mon épanouissement
celui qui me respecte
celui qui m'aime
la conscience.
L'Autre est en moi.

       Sartre en avait décrit un. Les deux existent.


FLORENCE BOISSE


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C'est pas moi, c'est lui !


       Qui est donc celui-là, face à moi, si semblable à ce que je suis, mais si riche de ses différences ?

       Qui est cette personne qui paraît n'avoir peur de rien, mais qui craint de partir à la rencontre de ce qu'elle est ?

       Qui es-tu, toi, pour regarder la vie avec des yeux si transparents que tu donnes l'impression que c'est ton âme qui s'y reflète ?

       Oui, toi, l'autre… ne serais-tu donc qu'un imaginaire écho d'une part de moi-même ?

       Parfois, je me suis isolée pour tenter de te comprendre, je me suis évertuée à t'écrire, mais c'est souvent à moi que j'ai adressé la lettre.

       Parfois, je t'ai soigneusement évité pour essayer de ressentir si tu allais me manquer et j'ai compris que c'est toi qui avais manqué de moi.

       Parfois, je suis venue à toi, mais je n'ai pas rencontré cet autre que j'espérais.

       Alors j'ai rebroussé chemin.

       J'ai repris mon bâton, ma besace de pèlerin et tout mon courage pour suivre une autre route.

       Sans relâche, j'ai bâti peu à peu dans mon quotidien avec quelques menus détails de quoi nourrir ma relation à l'autre : de ces simples échanges de regards, de sourires et de mots, à ces heures de tendre et délicieuse complicité.

       Quelquefois j'ai éprouvé de véritables désillusions, parce que tu m'avais trahie, parce que tu m'avais ignorée, parce que tu m'avais rejetée.

       Et là, j'ai souffert de ce que l'autre et moi-même n'ayons su préserver entre nous l'harmonie.

       Quelquefois je me suis sentie écoutée, estimée et aimée.

       Et là, j'ai connu l'immense joie d'irradier le bonheur d'exister.

       Car, sans toi, l'autre, quel sens aurait ma vie ?

       Si je n'arrivais à entendre ce que tu veux me dire, à vibrer de ce plaisir d'être ensemble, à goûter notre douce félicité commune, à te faire comprendre chaque jour un peu de ce que je suis, à comprendre chaque jour un peu de ce que tu es, quel saveur pourrais-je en substance donner à chaque instant ?

       Car j'ai aussi vécu ce sentiment décourageant de t'avoir attendu en vain et le paradoxe de t'avoir trouvé là, où et quand je désespérais de toi.

       L'humanité de l'autre reste un grand mystère dans l'existence, avec cette espèce de surprenante capacité à se révéler dans des conditions imprévisibles et à se dissimuler là où tout laissait à croire que nous allions la percevoir.

       L'autre, en effet, a cette propension fâcheuse à se protéger… son aura de mystère le rend, il est vrai, encore plus attirant.

       L'autre, et c'est encore le même, se livre et se dévoile, et permet à la relation de grandir et s'enrichir de cette confiance mutuelle faite de ces confidences réciproques.

       L'autre, à la fin, deviendra ce qu'il est et nous permettra d'être ce que nous sommes, complémentaires et différents, respectueux l'un envers l'autre, parce qu'au fil du temps nous aurons compris que nous respecter et nous aimer nous-mêmes était le plus beau des cadeaux que nous puissions faire… à l'autre.


ELISABETH COURBARIEN


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¡No soy yo, es él!


       ¿Quién es ese frente mío, tan parecido pero tan rico por sus diferencias?

       ¿Quién es esta persona que parece no tener miedo de nada pero que teme partir al encuentro de lo que ella «es»?

       ¿Quién sos vos para mirar la vida con tus ojos tan transparentes que das la impresión de que en ellos tu alma se refleja?

–Si, vos, el Otro tal vez no seas que el eco de una parte de mi misma.

–A veces me he alejado para tratar de comprender, me he esmerado para escribirte, pero ha sido a mí, frecuentemente que la carta estuvo dirigida.

–A veces te evité cuidadosamente para tratar de saber si podría extrañarte y comprendí que era yo quien te faltaba.

–A veces he venido hacia vos pero no te encontré como esperaba. Entonces, rehice el camino. Retomé mi bastón, mi alforja de peregrino y todo mi coraje para seguir otra ruta.

–Sin cesar, construí poco a poco mi vida cotidiana con pequeños detalles para alimentar mi relación al Otro: cambios de miradas, de sonrisas y de palabras en horas de tierna y deliciosa complicidad.

–A veces sufrí verdaderas desilusiones porque vos me habías traicionado, ignorado, rechazado.

       Y entonces sufrí de que el Otro y yo misma no hayamos sabido proteger la armonía entre nosotros.

–Algunas veces me sentí escuchada, estimada, amada.

       Y entonces conocí la alegría de irradiar la felicidad de existir.

       ¿Porque sin vos, el Otro, qué sentido tendría mi vida?

–Si yo no llegara a escuchar lo que querés decirme, a vibrar ante el placer de estar juntos, a gustar nuestra dulce felicidad compartida, a hacerte comprender cada día un poco quien yo soy, a comprender cada día un poco más de lo que vos sos ¿Qué sabor podría yo, en sustancia dar a cada instante?

–Porque yo también conocí ese descorazonante sentimiento de haberte esperado en vano largo tiempo y la paradoja de haberte encontrado cuando ya desesperaba de vos.

–La humanidad del Otro constituye un gran misterio de la existencia por esa especie de sorprendente capacidad de manifestarse en condiciones imprevisibles y de disimularse allí donde todo nos lleva a creer que va a manifestarse.

–El Otro, en efecto, tiene la molesta predisposición de protegerse… Su aura de misterio, en realidad lo vuelve aún más interesante.

–El Otro, y es todavía el mismo, se abandona y se desenmascara permitiendo así a la relación crecer y enriquecerse de esa confianza mutua hecha de confidencias compartidas.

–El Otro, finalmente, llegará a ser y nos permitirá llegar a ser lo que realmente somos: seres complementarios y diferentes, recíprocamente respetuosos porque a través del tiempo habremos comprendido que amarnos y respetarnos a nosotros mismos es el más ello de los presentes que podemos brindar al «Otro».


ELISABETH COURBARIEN


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El Otro


       Este artículo es una colaboración interdisciplinaria. Como socióloga y doctora en psicología social, he deseado y solicitado a mis colegas sociólogos del instituto Truman de la universidad hebrea de Mont Coupus de expresarse sobre el tema que es crucial hoy en toda cultura ó sociedad: «el Otro.»

–La definición del Otro es uno de los ejes fundamentales en la construcción de entidades colectivas.

–Las distintas maneras de definir el Otro tienen consecuencias tanto a nivel institucional como de la acción colectiva.

–Todas las identidades colectivas varían en términos de su exclusividad y están definidas en relación a colectividades externas.

–Las identidades nacionales están mantenidas sobre la base de las diferencias de percepción entre el Otro: interno ó externo.

–Las referencias al Otro varían en términos de importancia y su repertorio cambia según el paso del tiempo. Sin embargo, el Otro ó los Otros que fueron centrales en el período constitutivo de la organización de la sociedad global dejan sus marcas en la cultura y en las instituciones de la colectividad aún cuando su importancia haya declinado. Por ejemplo, España en la identidad mejicana.

       Esos Otros pueden ser conceptualizados con diferentes grados de realismo y esto puede determinar diferentes cursos de acciones.

–La localización del Otro puede ser interna ó externa y la referencia puede, naturalmente, ser positiva ó negativa.

–En el caso de referencia positiva, estamos frente a identidades colectivas que tratan de integrar al Otro a la comunidad social, regional, religiosa ó ideológica.

–Una referencia negativa al Otro interno puede tomar formas diversas dependiendo del valor que se le de al Otro en tanto que se lo considere minoría ó elemento periférico ó marginal. En éste caso, hablamos de una situación de exclusión en la que la mayoría de la comunidad trata de controlar, reprimir hacer mover ó eliminar a los Otros que son minoría ó están marginados.

–En cuanto a la percepción negativa del Otro externo por la comunidad, vemos que la colectividad trata de establecer su identidad a base de antagonismo y resentimiento centrado en el Otro.

–Sin duda que la percepción del Otro puede ser contradictoria ó ambivalente, pero siempre prevalese una definición positiva ó negativa que acompaña a la definición del Otro.

–Un Otro social positivo puede ser definido como un amigo ó un aliado, ó como un patrón ó un protector mientras que el Otro negativo puede ser definido como un enemigo ó como un opresor poderoso.

–Los conceptos a los que hacemos referencias son válidos en psicología social. La identificación en los grupos familiares de uno de sus miembros como «chivo emisario» ó como «salvador» es clara: el Otro como negativo ó el Otro como positivo y benefactor.

–En cuanto a la psicología individual, deberemos pensar al Otro, bueno ó malo, poniéndonos en contacto con nuestros objetos internos y sus reacciones positivas ó negativas aisladas ó masivas según el impacto de estímulos sociales.


Hecho en colaboración:
Doctora Batia Siebzehner, socióloga, Instituto Truman, Israël
Doctor Carlos Waisman, sociólogo, California, USA
Doctora E. Graciela Pioton-Cimetti, socióloga, Paris, Francia


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La misère de la vieillesse
(traduction des poèmes du numéro antérieur)


La vieillesse ?

C'est peut-être cette douleur
du demain qui ne pourra être meilleur
qui comme dix longues épines
traverse le bout de mes doigts
et couvre de décombres les miroirs
où même l'eau ne peut les effacer.
C'est peut-être cette haine embusquée
dans le dernier vestige de la beauté,
haine vieille, répétée, concentrée
martyrisant le peu qui nous reste.
Aggravée chaque jour, gangrène irréversible,
inévitable croix de l'être humain.
La vieillesse

Dans mes jours rayonnants tu n'existais pas
tu es apparue un jour sans scrupules
soufflant ton haleine pestilentielle
et même là je t'ai niée,
je n'ai pas voulu te voir.
J'avais tant à aimer, à connaître,
à découvrir et compléter
que je t'ai laissée traîner parmi mes affaires
comme une chose de plus sans importance.
Personne ne m'a avertie que tu existais
ce sont des choses dont on ne parle pas
et si quelqu'un la nomme
tout le monde tremble
essayant de montrer ce qui leur reste :
un joli sourire,
un regard alerte,
un geste caressant de la main
et puis rien.
La vieillesse ?

Pour moi elle a toujours été répugnante
et cependant je veux vivre encore.
Je ne sais si un jour j'ai été jeune.
Je suis née vieille et vaincue et sans temps
même pas de temps pour t'aimer.
Je ne sais pas encore qui tu es mais je t'aime.
Je t'aime dans un futur jeune
même si je sais que ce qui fut jeune est déjà du passé.
La vieillesse

Elle nous rend durs,
durs face à l'obligation de la supporter,
nous n'avons plus le temps,
nous ne pouvons dire deux fois la même phrase.
L'impatience apparaît,
pour être présentables
on utilise des subterfuges.
Les cheveux perdent leur poids
la colonne se tasse
nous commençons à porter l'univers
appuyé sur les vertèbres dorsales.
Le coeur réclame le repos
les os le lit
Nous nous demandons si nous avons aimé
moins que si l'on nous a aimé
Nous nous souvenons vaguement du désir
mais nous ne réussissons pas à le nier…
parce qu'il est toujours présent
parce qu'il brûle encore
parce qu'il brûlera toujours.
La vieillesse

Bienheureux
ceux qui ont su différencier leurs désirs
des désirs désirés par les autres pour eux
Bienheureux
ceux qui ont marché fermement
ceux qui se sont reconnus en aimant
ceux qui ont su se donner en caresse
et exiger de l'autre la caresse
Bienheureux ceux qui ont abandonné la culpabilité
les assoiffés qui ont compris la caducité
et ont réclamé fébrilement l'être aimé
Bienheureux
ceux qui ont osé être
ceux qui, même vieux, gardent le sourire
ceux qui croient en un Dieu ingénument
et une mère éternelle toujours vierge
qui accepte leurs dépouilles sans rejet.
La vieillesse

Il y a plusieurs vieillesses à supporter dans le projet humain
toutes pareillement insupportables
la vieillesse des parents ? Un supplice
notre propre vieillesse ? Inabordable
Mais ensuite si le temps passant et sans le vouloir
parce que peut-être durerons-nous plus que nous le pensons
la vie nous confronte à nos enfants vieillissants !
Je n'ose même pas l'imaginer !
Toute mère sait qu'en donnant la vie
elle condamne à la mort inévitable
D'accord, c'est vrai et point.
Mais le condamner à cette entité obscure et dangereuse,
à la vieillesse qui sans trêve nous dévore
Cette vérité devient insupportable.
La vieillesse

C'est la perte de l'identité
qui pendant de longues années d'analyse psychologique
nous arrivons à acquérir à grande peine.
La vieillesse

On dit qu'en un certain temps, en un certain lieu
les vieux ont servi à quelque chose
Quels vieux, comment et quand ?
Ceux qui ont gardé une âme sans misère ?
Ceux qui ne se sont pas fatigués d'être vivants ?
Ceux qui se sont fanés seulement en apparence ?
Aujourd'hui, face à la vérité du siècle qui s'épuise
Ce sont les vieux qui sont partis qui savent
Regardons sans angoisse démographique
la pyramide chargée de gériatres
Si la supposée « qualité de vie »
les a rendus nombreux et victorieux
elle n'a pas cessé pour autant de les incruster
dans la mort civile d'abandonnés.
La vieillesse

Que pense ma petite vieille maman
plongée dans un monde de laideur ?
Je ne sais pas, ce n'est pas très clair
Bien sûr, elle est très bien soignée
Je crois qu'elle a cessé de penser
Elle lit beaucoup, elle se nourrit en lisant,
elle s'enferme dans la survie.
– J'assume l'obligation de penser pour elle,
– J'accepte l'impossibilité de penser comme elle.
J'essaye de l'approcher à travers Dieu
mais aujourd'hui Dieu refuse ou est-ce moi qui le refuse ?
Dans tous les cas et de tout point de vue
je ne comprends pas Dieu et aujourd'hui je ne l'accepte pas
Il semble être un maniaque sadique
Peut-être a-t-il tué son fils pour qu'il ne vieillisse pas ?
Et, en tout cas, les prophètes ?
quelle part de faute avaient les prophètes
dans la cruelle mort de mon Christ ? (À Thérèse)
La vieillesse

J'ai mal simplement
de la voir apparaître chez ceux que j'aime
embusquée toujours,
triomphante toujours,
macabre toujours.
Je voudrais me retirer de cette douleur
pudiquement
mais la vieillesse est obscène et provocante
J'ai toujours aimé les vieux
je les ai traités comme mes enfants
j'ai été heureuse avec eux
ils m'ont aimée
parce que je les aimais
parce qu'étant née vieille
ils étaient mes frères
j'ai cherché dans leurs visages la beauté et toujours
je l'ai trouvée venant au creux de ma main
à la rencontre fugace de ma caresse.


E. GRACIELA PIOTON-CIMETTI


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